La Cour de cassation reconnait encore de nouveaux préjudices automatiques

Par |2024-04-10T17:59:24+02:00avril 9th, 2024|actualités, actualités générales|

 

Jusqu’en 2016, la Cour de cassation appliquait la thĂ©orie du prĂ©judice automatique afin d’indemniser des salariĂ©s en raison du manquement de l’employeur Ă  ses obligations, sans qu’il ne soit nĂ©cessaire de dĂ©montrer un prĂ©judice pour le salariĂ©.

En 2016, la Cour de cassation a opĂ©rĂ© un revirement de jurisprudence et juge depuis que le salariĂ© doit rapporter la preuve d’un prĂ©judice afin d’ĂȘtre indemnisĂ© (Cass. Soc. 13 avril 2016, n° 14-28.293).

Ce revirement n’est cependant pas total et la thĂ©orie du prĂ©judice automatique a notamment subsistĂ© en matiĂšre de durĂ©e maximale du travail (Cass. Soc., 26 janvier 2022, n° 20-21.636 ; Cass. Soc., 11 mai 2023, n° 21-22.281 ; Cass. Soc., 27 septembre 2023, n° 21-24.782).

Dans deux rĂ©cents arrĂȘts, la Cour de cassation a une nouvelle fois appliquĂ© cette thĂ©orie du prĂ©judice automatique :

  • En matiĂšre de non-respect du temps de repos journalier d’un salariĂ© prĂ©vu par un accord collectif. À notre connaissance, c’est la premiĂšre fois que la Cour de cassation applique la thĂ©orie du prĂ©judice automatique s’agissant d’une disposition conventionnelle plus favorable que la loi (Cass. Soc., 7 fĂ©vrier 2024, n° 21-22.80) ;
  • En matiĂšre de droit Ă  l’image d’un salariĂ© dont l’employeur avait usĂ© sans obtenir l’accord de l’intĂ©ressĂ© (Cass. Soc., 14 fĂ©vrier 2024, n° 22-18.014).

Dans ces deux nouveaux cas, le salariĂ© faisant une demande de dommages-intĂ©rĂȘts n’a pas Ă  justifier de son prĂ©judice pour obtenir une indemnisation, mĂȘme si le montant restera toujours Ă  l’apprĂ©ciation des juges du fond.

La recevabilitĂ© de la production de donnĂ©es personnelles issues d’un systĂšme de vidĂ©osurveillance

Par |2024-04-09T18:18:40+02:00avril 9th, 2024|actualités, actualités générales|

La Cour de cassation a rendu rĂ©cemment un arrĂȘt qui dĂ©montre un inflĂ©chissement en matiĂšre de preuve illicite (Cass. soc., 14 fĂ©vrier 2024, n° 22-23.073).

Dans cette espĂšce, une sociĂ©tĂ© constate des anomalies dans ses stocks et soupçonne d’abord un vol par des clients. Toutefois, Ă  la suite du visionnage des enregistrements issus de la vidĂ©o protection, cette hypothĂšse est Ă©cartĂ©e.

La responsable de la société décide alors de suivre les produits lors de leur passage en caisse et de croiser les séquences vidéo sur lesquelles apparaissaient les ventes de la journée avec les relevés des journaux informatiques de vente.

En moins de deux semaines, elle a alors relevĂ© au total dix-neuf anomalies graves Ă  la caisse d’une salariĂ©e, entraĂźnant ainsi son licenciement pour faute grave.

Cette salariĂ©e conteste cette rupture en soulevant que la preuve des griefs qui lui sont reprochĂ©s est illicite dĂšs lors qu’il s’agit de l’utilisation disproportionnĂ©e de donnĂ©es personnelles issues d’un systĂšme de vidĂ©osurveillance.

Toutefois, les juges du fond ont soulignĂ© que le visionnage des enregistrements avait Ă©tĂ© limitĂ© dans le temps, dans un contexte de disparition de stocks, aprĂšs des premiĂšres recherches restĂ©es infructueuses et avait Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© par la seule dirigeante de l’entreprise.

Ils en ont donc dĂ©duit que la production des donnĂ©es personnelles issues du systĂšme de vidĂ©osurveillance Ă©tait indispensable Ă  l’exercice du droit Ă  la preuve de l’employeur et proportionnĂ©e au but poursuivi, Ă  savoir le droit de veiller Ă  la protection de ses biens, de sorte que les piĂšces litigieuses Ă©taient recevables.

La Cour de cassation valide le raisonnement de la Cour d’appel, et considĂšre qu’elle a mis en balance de maniĂšre circonstanciĂ©e le droit de la salariĂ©e au respect de sa vie privĂ©e et le droit de son employeur au bon fonctionnement de l’entreprise.

Attention toutefois, cela ne signifie pas que l’utilisation d’images issues d’un systĂšme de vidĂ©osurveillance sera systĂ©matiquement considĂ©rĂ©e par les juges comme licite. Cette utilisation doit ĂȘtre indispensable Ă  l’exercice du droit Ă  la preuve et proportionnĂ©e au regard du but poursuivi par l’employeur.

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